Viscéralement terrienne
Les monts sont de faux solitaires
Les moussons qui les bordent en plaine
Les lits qui s’en contemplent sur les hauteurs
Qu’on table sur isolement et l’on se trompe
Tout est lié, de leurs erratiques heurts initiaux
Jusqu’aux profondeurs du temps, jusqu’aux trombes de sang terrestre
On sentirait tristement la nostalgie de là-haut : on s’y méprendrait
De la gymnastique d’apparence figée qu’ils ont
Mieux vaut voir une élasticité durable et prolongée
Et que d’une plaine à l’autre, les chaînes se répètent
Interconnectées d’un pic à l’autre, d’un abime au plateau
N’y a-t-il pas ici écho humain ?
Dans les cavités qu’ils recèlent, dans la gravité qui s’y décèle parfois
Des sels marins, sur ces parois, se retrouveraient
Antiques et de plus loin, de quand l’homme s’en inspirait encore
N’était pas roi et pas même en passe d’éclore
Mais sûr qu’il s’inspirait déjà de l’environ pour sa nature
Par sa nature, la montagne volcanique ou s’élevant
A élever les yeux et les fureurs de conquêtes
De millions de petites entités dont les antennes, encore, cherchent à sonder
Le sang des volcans reste énigme, des sentiers de cimes aussi
Au son des hauteurs, des chocs entre ambitions, peurs et joies
En dedans l’humain entend réponse et question
Il se tend, s’époumonne, se compare : à ces monts
En déduit du maintien, de l’assise ou des fragilités
Jusqu’à celles de son équilibre, ses émotions précaires
Et l’agilité durable pourtant, de ses feux et prémonitions
En regards il puise là-haut des éternités
Ses sens sont des épuisettes à pulsions, à éruptions
Sa vie bien plus vite épuisable, impulsion brève et vivace
Mais pas moins soudaine que ce qui est à sourdre là-dessous
La source est ici, l’étincelle à tisser aussi
Dans des voiles de brume ou des vagues de magma
L’humain sait, pressent, que ces présences le veillent, le guettent
L’humain sent que s’éveille en lui l’instinct le plus dévorant
Dès lors qu’en instillant une œillade ici là-haut
Il s’aperçoit du clignement des nuages, des tremblements qui opinent
Débordant alors d’enthousiasme et de grandeur et d’acuité
Percevant que ses humeurs sont des proies qu’on prise sauvagement
S’apercevant qu’en montagne ou au volcan, à leurs pieds, à l’épier
Sa nature pourra être confondue ou comprise :
Immatériel terrain, viscéralement terrienne
Jean-Marie Loison-Mochon