Les ponts parallèles
Un parallèle de ponts
Une pleine Lune qui se dépeint
Deux ponts, un parallèle
D’une Lune qui se dépatouille des nuages
Parallèle entre rouille et modernité
L’ancien, aux armatures mitées
A son aile l’autre, à l’âme encore sûre et parcourue
A la mâture aux deux triangles noirs
Noirs et striés, aux corps suspendus sous la Lune
Aux corps tendus vers la Lune, elle que l’on dit angle mort
On s’enduit ici de lueurs ennuagées
Mouvements que la nuit véhicule
Phares mouvants des bords de rade, de par-dessus
Couve un manteau d’obscurité, sur l’ancien et délaissé
Là où l’on peut se délasser du jour, déborder de pas
Octobre s’ouvre, dans cette étrange acuité
Celle des lueurs qui déboulent au flanc
Celle délurée qui s’écoule dans une étrange traversée
Aux confins des triangles, la Lune se débat comme effarouchée
Au long flanc de l’ancien, des phares rouges et filants
Ils effilochent le silence, ronflants et lancés
S’enfoncent au loin comme un fluide à ces triangles
Et s’étirant, gronde la couleur du sang
Il est tentant de dire, qu’en ces moteurs suicidaires
Le rouge effleure le noir, d’une lucidité fertile
Octobre s’ouvre et verdit l’idée dans le chenal
Comme à demi dans la nuit, vers d’innombrables idées
Tout chenal s’élude ici ou là, dans d’innombrables horizons
Touche à deux ponts parallèles, qu’à la nuit l’on caresse
Comme un canal dont le bruit ondule de Nantes à Brest
Ça n’a l’air de rien, deux ponts, la nuit, des pas
Mais tout est entente et dissymétrie, dans cet Ouest à l’air marin
Canal aérien, deux triangles en tension
S’y dissimulent des traits, comme ce rouge fuyant
Fluide étrennant sa couleur, sa foulée dans les ombres
Et les ombres dansent de pas, traversées d’éclats
Le rouge en fluidifie les contours
Le rouge enfui, la Lune en prend le relais : ventrue
Lueur ajourant les ombres, en proie à l’idée
L’idée du saut dans le froid de la rade, pour les déçus
Le sceau de la fertilité pour cette autre ombre
Aux traits arrondis au niveau du ventre
Actrice de la nuit, celle-là qu’on dit entre les lignes
Factice qui ondule entre les rêves, de lueurs qui signent
Entre les vibrantes humeurs du pont, son parallèle
Délirantes lueurs, qui muettes signent des providences
S’étirant toutes luisantes derrière la moiteur
Ces tyrans de nuages, dont le molletonneux brouille
Entre rouille et modernité, par un parallèle permanent
En pensées, de cotonneuses fouilles
Antre à Providence, ombre arrondie et floconneuse
Il faut connaître un langage, pour dessiner en contours
Pour engager des cimes d’idées, sur le replat des parallèles
Dont à l’aile l’un de l’autre, la Lune fait un repas
Elle-même dévorée de part en part, de flou
Par la folie des nuages qui la sertissent
Comme si ses lueurs pouvaient se déliter
Comme si le délice de la nuit pouvait sauter
Du haut d’un pont sans triangle ou fertilité
Duo de ponts dont les lueurs d’un seul s’époumonnent
Sous cette rade cotonneuse et fertile en nuées
Sous une lune radieuse mais contrariée
Qui s’époumonne en lueurs, luminosité striée
Deux triangles noirs qui dans la nuit, sans crier gare
Osent ici se dresser pour s’iriser du feu fertile
Là au large d’une ville, à l’apogée des phases
Rouge adressé au noir, dans l’anarchie des signes
Où jaillissent des pluies de sons insensés
Qui au fond se déplieront, en des sens que le noir aura hissés
Jean-Marie Loison-Mochon
Crépuscule d’un cycle