Fragment 13 – Clapot à fond de cale
Dehors le froid, Saint-Malo s’habillera
Rapides on se frôle à bord, dans l’heure il faudra partir
Au port fumant du soir, nous sortirons faire semblant
Parfum de fond de tiroir, dépôt fumeux d’énergie
En humeur de devoir, nous sertirons les corps de nu
Au bateau l’on feint ne pas savoir, alors on coud la Nuit
Un faux qui aura tôt fait de nous passer par la corde
Notre étreinte est un pathétique clapot à fond de cale
Or de cela on ne sort pas sauf : on s’éreinte
Inepte teinte à nos arômes : du rhum aurait mieux fait l’affaire
Rasoir piraterie dont je n’honore pas mieux la complainte
Depuis quelques mois, tu es du port. Pas de celui-là, mais de port en port tous les départs se font écho. Pour autant tu n’as pas pris fait et cause pour la maxime. Toi femme de chacun de ces ports, tu ne veux presque qu’un seul homme. Alors tu t’arrimes à l’idée, après t’être naufragée l’été dernier. Il y avait de l’intention dans ta traversée, d’Est en Ouest à l’estival. Laisser les cigognes pour les goélands, tu n’étais pas cigale en arrivant. Belle intention oui, mais la tension baisse et tu veux revenir à des chaînes, vainement identiques à celles qui te brisèrent. Tu voudrais rebattre les cartes et dans la brise changer les règles du jeu. Oui mais je, suis aussi, et en appel de départ, en port d’encre, dont les cales ont été vidées. L’hiver dernier je n’obéissais qu’à l’anarchie du désir, j’étais porté par des éphémères de vide, des éphémères de vie. Alternance pour une cadence mutine, devant nous mener droit, ma voile et moi, à l’Argentine. Or, à fond de cale dans ce froid de Nord, la chaleur de ton corps m’est étroite comme la cabine. Je ne dégage rien, je n’irradie pas, alors que tu aurais tout d’un genre de paradis. Patauds tous deux, nous pourrions voir le froid fumer au hublot. Tu te divertirais ainsi mieux, comme à guetter qu’un marin ait fini de fumer sa pipe. On sortirait de notre parallèle de courte inertie, qu’il viendrait nous dire : « mais que faites-vous, amis ? Du désir vous en avez mais est-ce ensemble que vous devez l’utiliser ? ». Je regarderais tes grands yeux bleus, je ferais le marin et dirais une fois encore que tu vaux mieux que de m’espérer comme quelqu’un qui ne reviendra pas. Car je reviendrai. Le large c’est toi qui dois le prendre, pas du nous fraternel, mais de ta crainte de n’être pas celle que tu voulais.
Dehors le froid, Saint-Malo s’habillera
Rapides on se frôle à bord, dans l’heure il faudra partir
Au port fumant du soir, nous sortirons faire semblant
Parfum de fond de tiroir, dépôt fumeux d’énergie
En humeur de devoir, nous sertirons les corps de nu
Au bateau l’on feint ne pas savoir, alors on coud la Nuit
Un faux qui aura tôt fait de nous passer par la corde
Notre étreinte est un pathétique clapot à fond de cale
Or de cela on ne sort pas sauf : on s’éreinte
Inepte teinte à nos arômes : du rhum aurait mieux fait l’affaire
Rasoir piraterie dont je n’honore pas mieux la complainte