Attention hagarde
Où est-elle cette île ?
Le crépuscule s’étale en rose, en escaliers ennuagés
Ouate élaborée d’une ville anarchique
Anarchique éphémère, qui s’étoilera bientôt
Me voit-elle cette île, à l’orée de l’horizon ?
J’erre extatique en bord de mer : attentif
Miroite-t-elle, sous les nuages s’étageant ?
Optique effet de l’air ? mais…
L’ermite sait qu’une île, ça ne disparaît pas comme ça
Les faits sont là : elle, n’y est pas
Aucun mythe n’émet l’idée
Bien que toute idée soit un mythe
Avant d’émettre parfois, des réalités
Tout ridé le jour, et c’est tant mieux, s’en va
Engorgé de nuages extravagants
Tout vidé, mais d’une île il n’en a pas le droit !
Ces nuages font escale, en marche
Forgeant l’idée en moi…
Ces nuages font escalier, des marches
Où est-elle cette île ?
Cette île a bel et bien dû monter
Ou dans l’envers du feu… descendre ?
Une petite Babel à part de tout
N’ayant peur de rien, sur la mer : une tour
Elle aussi bat l’envers du feu
Comme mes yeux roussis d’horizon
Bout l’envers du feu, dans les vapeurs de rose
Boule au ventre j’erre, partageant ma sueur
Ce phare au centre, mais rien dessous
La boule aux cent rayons laisse la place
Elle carrosse au centuple, une voie d’étoiles
Où se trouve le soulier ? Où est-elle cette île ?!
Elle devrait rosir là, lacée à l’horizon !
Pied à terre pour tout soulard ou tout rêveur
Bien que tout rêveur ait en dessous, l’art de s’enivrer
Avant de dériver parfois, dans des réalités
La tour, elle veut me dire… ?
Rien, que de river mes yeux sur elle
Car le feu d’un phare ne dit rien d’autre
Le feu parle par mesures dans ce ciel
L’usure des notes de lumière
Le phare parlemente, dénote, s’oublie, détonne
Subitement… rien, l’usine à rose perdure
Cependant, ces notes…
Et si ce phare était le sien ?
Les phares mentent peu, même s’ils ne disent rien
Par quel mantra ou montage, l’île aurait-elle plongé ?
L’effarement alors !
Seul son feu s’ajourant en surface
Le phare montre : l’île descendue
Une île s’étant enduite d’océan, plus que de raison
Dans le doute, chercher encore…
Une île s’étendrait sous l’eau ?
Bonne à être pêchée, mettant trop peu de discrétion
Emettant trop de rose, vapeur d’apothéose en émanant
Sécrétions insulaires, que seule une canne céleste saurait hameçonner
Des tons très osés, à faire affluer dans des filets
Sélection d’instants arraisonnés, c’est l’estuaire de la fin
Des temps du début, grand recommencement nocturne et salin
Sous l’eau que fait-elle cette île ?
Un bout de temps qu’elle n’avait pas dû voir les fonds
Les poissons s’en étonneront
Dans un bout de temps -demain- je reviendrai
Voir si son reflet au loin reparaît
Ou si ce bout de lande est à repêcher
J’y dépêcherai encore des flots de regards
Ces flous rendent en moi trop de vagues
Je dépêcherai mes filets d’attention hagarde
Draguant ainsi des fonds d’algues et nuages
Goémon rose laissé par cette île dans l’ultime heure
Dernier baiser aux yeux, d’un crépuscule séducteur
Jean-Marie Loison-Mochon
Crépuscule d’un cycle