Attention hagarde - Crépuscule d'un cycle - Jean-Marie Loison-Mochon

Attention hagarde

Où est-elle cette île ?

Le crépuscule s’étale en rose, en escaliers ennuagés

Ouate élaborée d’une ville anarchique

Anarchique éphémère, qui s’étoilera bientôt

Me voit-elle cette île, à l’orée de l’horizon ?

J’erre extatique en bord de mer : attentif

Miroite-t-elle, sous les nuages s’étageant ?

Optique effet de l’air ? mais…

L’ermite sait qu’une île, ça ne disparaît pas comme ça

Les faits sont là : elle, n’y est pas

Aucun mythe n’émet l’idée

Bien que toute idée soit un mythe

Avant d’émettre parfois, des réalités

Tout ridé le jour, et c’est tant mieux, s’en va

Engorgé de nuages extravagants

Tout vidé, mais d’une île il n’en a pas le droit !

Ces nuages font escale, en marche

Forgeant l’idée en moi…

Ces nuages font escalier, des marches

Où est-elle cette île ?

Cette île a bel et bien dû monter

Ou dans l’envers du feu… descendre ?

Une petite Babel à part de tout

N’ayant peur de rien, sur la mer : une tour

Elle aussi bat l’envers du feu

Comme mes yeux roussis d’horizon

Bout l’envers du feu, dans les vapeurs de rose

Boule au ventre j’erre, partageant ma sueur

Ce phare au centre, mais rien dessous

La boule aux cent rayons laisse la place

Elle carrosse au centuple, une voie d’étoiles

Où se trouve le soulier ? Où est-elle cette île ?!

Elle devrait rosir là, lacée à l’horizon !

Pied à terre pour tout soulard ou tout rêveur

Bien que tout rêveur ait en dessous, l’art de s’enivrer

Avant de dériver parfois, dans des réalités

La tour, elle veut me dire… ?

Rien, que de river mes yeux sur elle

Car le feu d’un phare ne dit rien d’autre

Le feu parle par mesures dans ce ciel

L’usure des notes de lumière

Le phare parlemente, dénote, s’oublie, détonne

Subitement… rien, l’usine à rose perdure

Cependant, ces notes…

Et si ce phare était le sien ?

Les phares mentent peu, même s’ils ne disent rien

Par quel mantra ou montage, l’île aurait-elle plongé ?

L’effarement alors !

Seul son feu s’ajourant en surface

Le phare montre : l’île descendue

Une île s’étant enduite d’océan, plus que de raison

Dans le doute, chercher encore…

Une île s’étendrait sous l’eau ?

Bonne à être pêchée, mettant trop peu de discrétion

Emettant trop de rose, vapeur d’apothéose en émanant

Sécrétions insulaires, que seule une canne céleste saurait hameçonner

Des tons très osés, à faire affluer dans des filets

Sélection d’instants arraisonnés, c’est l’estuaire de la fin

Des temps du début, grand recommencement nocturne et salin

Sous l’eau que fait-elle cette île ?

Un bout de temps qu’elle n’avait pas dû voir les fonds

Les poissons s’en étonneront

Dans un bout de temps -demain- je reviendrai

Voir si son reflet au loin reparaît

Ou si ce bout de lande est à repêcher

J’y dépêcherai encore des flots de regards

Ces flous rendent en moi trop de vagues

Je dépêcherai mes filets d’attention hagarde

Draguant ainsi des fonds d’algues et nuages

Goémon rose laissé par cette île dans l’ultime heure

Dernier baiser aux yeux, d’un crépuscule séducteur

 

Jean-Marie Loison-Mochon

Crépuscule d’un cycle

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