Vendée Globe 2024 | Dimanche 12 janvier 2025
Certains auraient hâte que ça se termine, en glanant les ultimes milles
On régate, on court, les dégâts tempérés ou dont composer
« les deux se rapprocheront des côtes bretonnes » plus Sud que Glénan
Mais que ça se termine, certains n’en décident pas
Casse ! loin, de « l’axe qui maintient l’étai de J2 »
A l’entrée de l’ascenseur final, aux portes de l’Atlantique
Pas d’attentisme, il réparait, répara, mais ne repartira pas sous temps
En las Malvinas: no se puede, repelear la agresión
Pas l’envie qui manque, mais à cet isthme ou appendice d’un quai, il doit
Concéder l’abandon, pelé par la rudesse du Sud qu’il a pourtant passé
Il « a donc fait le choix prudent de se rapprocher des Malouines »
A ceci près qu’échouer n’est pas un choix, mais une contrainte maline
Bien que l’échec eût pu être pire, qu’un mal, la guigne
Bien que l’échec n’en soit pas même un : simples limites atteintes
L’étreinte des mers environnantes lui fût trop forte
A ce navire esquinté juste ce qu’il faut, juste là où il faut
Pour ne plus pouvoir fonctionner au carburant ultime
Qui n’est pas le vent mais la foi, que l’on ait des foils ou non
Or il eut été folie de poursuivre et s’exposer à briser davantage
Ainsi ! « se protéger des conditions virulentes à venir »
Se rappeler l’apogée de ces mots : qu’un chemin n’est pas ce que l’on a défini
Mais celui que l’on parcourt, avale, dévore
Et cela ne vaut pas rien
Marin ou terrien, se le dire à volonté
Que la prose est ce qui soudain cesse en soi
La poésie des douleurs ou joies, en course ou hors
Ne relève pas de la couleur des regards du monde
Mais de ce qu’elle élève en soi, pour soi, pour ceux qui nous importent
Et pour ce qui lui importe, il s’agissait de sauver
« Mon instinct me disait que je fonçais tout droit dans un piège »
Et quoi qu’on en dise, quoi que certains puissent soliloquer
Si le solitaire apposa un point sur cette page, du temps
Il convient de n’en penser pas trop, et d’accepter
Ce loquet mis sur les heures de compétition
Sachant qu’il veut sceller ce retour tout de même
« deux personnes de mon équipe arrivent »
Depuis l’arrivée, en avance sur son temps, qui n’a plus de retard
« c’est comme ça que ça devait s’écrire »
Non pas sentence mais sentant : ce moment
Peut-être pas propice mais celui de ne pas se mentir
De ne pas filer droit au précipice et faire l’écart
Dans ce port sous des conditions menaçantes
Avec le soutien des gens d’ici « il a posé pied à terre »
Course à la voile finie, course à l’avarie aussi
A l’avarice des conditions ou générosité en heurts hérités
Sur ces mers hérissées « elle a mis ses bras, autour de son cou »
La mer, dans des anfractuosités de vagues et creux et vacations non paisibles
Amie c’est vrai, mais autour de ce cas : trop dure, désarmante
« il l’a embrassée, elle avait un goût, de sel » celui des larmes
Bien plus qu’à mi-chemin, une calamité de plus d’endurée
A durer tous s’astreignent et certains, certaines, s’éteignent
Il n’en était pas lassé, elle a mis un coup, il saigne
Le sentier se teindra autrement, simplement
Il l’étreindra comme un autre au-devant, qui a repris son sort
Entre ses mains, entre ses toiles : à peindre à l’envie
Du vent, des avaries avalées, des voiles et de la coque : valide
« Elle a dit je crois, je sais du décor, l’envers »
Affalé sous des avanies de circonstances
Et lundi se réveiller encore, les bras en croix mais d’une simple attente
L’enfer attendra, il se l’est évité, à circoncire les instances de fin
« elle a mis ses bras, il a ployé, sous son aile »
L’envers à tout ça reste ici, un temps, une course en solitaire
Les bras tendus : vers une assistance, une aide
Puis il repartira de ces terres, suite à intervention
Quand d’autres aussi pourraient se mettre à fredonner
S’étirant d’une dernière ou avant-dernière nuit
« fût-elle promise, la terre attendra demain »
La main tendue, la mise bientôt emportée
« ou après-demain » l’attendu pour plus que la tendresse des siens
La tant désirée : fin, après des latences qui n’ont pas su l’en dévier
« il ne savait pas, comment bien tenter sa chance »
La tendre issue : celle d’un drapeau à damier
Tissu agité d’espoir « appâts peau d’azur et blanche »
Pour étancher une soif de quatre ans, deux mois et…
Combien de jours à l’heure de la franchir, cette ligne ?
Ce tracé ! de sa course solitaire, écrite sous les airs du monde
Les cris teinteront comme ceux des mouettes, dans quelques heures
De petits bateaux viendront accourir à lui, vainqueur
Dans la moiteur d’un janvier, après de derniers bords
De ceux qui éreinteront et sur l’arrivée… se voir ?
« Sur la rive flotte le grand drapeau de l’Europe »
Sévir de derniers efforts, et savourer ?
Lequel sera-ce ? premier de la flotte et candidat à ces saveurs
« étoiles sourdes comme les heures » dans ces fourrés de temps sous torpeur
Les énergies auront enfin tous les droits, de s’étioler
En des facilités ourdies, des mots enfin entendus en direct
Les émergences humaines, les amours et amitiés
Auxquelles à deux ils s’en reviennent
Au quai l’un après l’autre, à l’appel des ordalies dernières :
Désordre animé d’une foule matinale ? amanecer
O madrugar, comme drogués par la double rivalité
Celle de la poursuite, celle de la manne des mers et ces terres gagnées, regagnées
« dans l’eau froide et blême » et sûrement troublés au fond
D’être tout de suite alpagués, bientôt, bien tôt
« dans l’eau incertaine » encore, et seulement pour quelques heures
D’être tout : premier, vainqueur, record
A s’insérer dans les replis d’embrassades, à sincèrement célébrer
Y aura-t-il un monde fou sur la plage, ce jour-là ?
Au bout de ce jeu du large, avec la vitesse et la vie : pour tant, pas demain
Mais pour eux déjà ! quand « pourtant ce n’est pas dimanche »
Jean-Marie Loison-Mochon